Conte composé par Colette, inspiré de l'histoire originale de Chris Van Allsburg et popularisée par le film de  Robert Zemeckis.

Matériel : Une grande image de locomotive, qui est montrée aux jeunes chaque fois qu'il est écrit :
TCHOU ! TCHOU ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding !
Ce sont alors les jeunes qui font les sons du train.


Le Boréal Express


 Notre histoire se passe dans un charmant petit village des Cantons de l'Est. Nous nous retrouvons effectivement à Compton, chez la famille Letendre, à la mi-janvier de l'année 2005, à l'heure du souper.

- " Mais qu'est-ce que tu as Suzie ? "  Demande maman.
- " Rien ! "  Répondit  Suzie.
- " Écoute Suzie. Il y a forcément quelque chose qui te préoccupe. Regarde !  Tu viens de mettre du ketchup dans ton verre de lait. "
- " Oups ! Ce n'est rien je te dis. Je suis juste dans la lune."
- " Comme hier, quand tu essayais de manger ta soupe avec ton couteau ou avant-hier quand tu as versé du lait dans l'assiette de ton frère."  Ajoute papa.
- " Je ne sais pas ce qui m'arrive."

 Il est vrai que depuis quelque temps Suzie a des comportements plutôt bizarres. Elle est super distraite et  elle semble ailleurs. Qu'est-ce qui se passe ? Que lui arrive-t-il donc ? Ferait-elle une dépression d'après  Noël?

Il faut dire que cette année Suzie a mis beaucoup d'énergie à préparer la fête de  Noël qui  est la plus importante à ses yeux. Voici la liste de ce qu'elle a fait pour que tout soit parfait. Aidée de son père et de son petit  frère, Suzie a installé 1000 petites lumières toutes  blanches  dans le gros sapin  qui se trouve juste devant sa maison. Elle affectionne  particulièrement cette décoration. Elle la trouve tout simplement  majestueuse. C'est l'émerveillement chaque fois que, la nuit tombée, elle tourne l'interrupteur. Elle ne se lasse pas d'admirer son sapin.
 Par la suite, elle a fouillé dans le placard pour y trouver la boîte identifiée DÉCORATIONS DE Noël INTÉRIEURES. Ce fut dans une hâte presque maladive que Suzie étala tout le contenu de cette boîte au beau milieu du salon. Évidemment, tout devait être accroché, suspendu, collé ou même déposé ici et là dans sa maison.

 Est venue ensuite la chasse au sapin, comme le dit si bien son père. Ce troisième événement est d'une importance capitale pour Suzie car il se passe en famille, juste une semaine avant Noël. À partir de ce moment, le décompte commence. Plus que 7 jours avant la grande Fête et il reste encore beaucoup à faire.

Il faut maintenant décorer le sapin. Encore une boîte à vider; les guirlandes, les boules de Noël,  les lumières miniatures multicolores, la crèche avec ses personnages, l'ange ainsi que diverses décorations accumulées au fil des années. Voilà tout ce qu'il faut à Suzie pour que le sapin intérieur soit d'une grande beauté.

Même dans cette euphorie, Suzie n'oublie pas de préparer un petit quelque chose pour chaque membre de sa famille.  Elle fabrique elle-même ses petits cadeaux. C'est de l'énergie bien canalisée comme dit sa mère. Donc elle s'y met avec acharnement et aussi beaucoup d'amour. J'allais oublier. Suzie a également mis la main à la pâte  pour aider sa mère à cuisiner de bons petits desserts et bien d'autres petites bouchées délicieuses.

Donc le  24 décembre, tout était prêt. La fête fut une réussite totale. Le clou de la soirée fut  évidemment  la venue  du Père  Noël. Eh oui ! Le Père  Noël ! Celui-là même qui lui a apporté année après année un cadeau qu'elle lui avait demandé . Comme il est bon, grand  et généreux ce Père Noël. C'est probablement de tout cela que Suzie s'ennuie. Elle a les BLUES de Noël. Il faut dire que le temps des Fêtes est une période appréciée de bien des personnes. Suzie ne fait pas exception et peut-être même que...

- "Suzie!  Regarde ce que tu as fait! ", dit Rémi . "  Tu as mis de la moutarde à la place de la sauce au chocolat sur ta crème glacée. "
- "  Bon ! Suzie !  C'est assez ! Explique-nous ce qui t'arrive ! réplique maman.

C'était pourtant bien simple. Suzie doutait maintenant de l'existence du Père Noël. Tout cela à cause de Philippe Beauregard. À l'école, l'enseignante avait demandé aux enfants de raconter leurs vacances de Noël. C'était au tour de Suzie. Elle aime beaucoup parler cette chère
 Suzie et de façon détaillée. Dans son récit, elle en était au moment où le Père Noël avait fait son entrée, à l'improviste, comme toujours, dans son salon, au milieu des papiers d'emballage déchirés, lorsque Philippe Beauregard intervint.

-"Voyons Suzie, le Père  Noël, il n'existe pas !"
Suzie le foudroya du regard et répliqua
- "Philippe Beauregard,  tu sauras qu'il vient chez moi à chaque année  et il est fait de chair et d'os tout comme toi. "
- "Franchement Suzie !  Je te dis qu'il n'existe pas .  Ce sont des histoires de bébés. "

Essayant d'ignorer ce que Philippe venait de dire, Suzie reprit le fil de ses idées et continua tant bien que mal son monologue. Mais depuis ce jour, elle doute. Et si Philippe disait vrai?

Du haut de ses 8 ans et 34 jours, Rémi, son petit frère, essaya de rassurer Suzie.
" Suzie, moi je te dis que le Père Noël existe. Je ne comprends pas comment tu peux douter. Laisse-le parler, le beau finfin à Beauregard. Ça ne m’étonne pas qu’il dise ça parce qu’y est pas assez fin . Je suis certain que même le Père Noël veut pas aller chez eux. Y est jaloux ! C’est pour ça qu’y dit toutes ces niaiseries-là, torvisse qu’y est pas fin !  "

Ces paroles toutes simples, mais d’une très grande sagesse réconfortèrent Suzie. Rémi était peut-être petit, mais il avait toujours le don de lui remonter le moral. Ce soir-là, Suzie s’endormit beaucoup plus rapidement. Au beau milieu de son rêve, elle entendit sonner la flûte d’un train. Qu’est-ce que ce bruit venait faire à travers les glissades qu’elle faisait en compagnie de Bonbon son ourson en peluche ? Le bruit se faisait insistant et il se rapprochait dangereusement. Très fâcheux, vraiment très gênant ce bruit dans son si beau rêve.

TCHOU ! TCHOU ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding !

Suzie se réveilla. Elel voulait se libérer de ce bruit infernal. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, c’est le visage de Rémi qui était à 10 cm du sien, qui lui apparut. Elle sursauta, ne s’attendant vraiment pas à le voir dans sa chambre.
- Mais que fais-tu ici ?
- As-tu entendu la flûte d’un train ou bien j’ai rêvé ?
- Quoi ? Toi aussi, tu l’as entendue ?
- Ben oui, si je te le demande ! Tiens, écoute, là voilà encore !

TCHOU ! TCHOU ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding !

Un train ! Près de leur maison ! Comment est-ce possible ? Il n’y a même pas de voie ferrée ! Ils se dirigèrent lentement vers la fenêtre. Quelle ne fut pas leur surprise de voir un train, un vrai train ainsi que son conducteur qui leur faisait de grands gestes de la main, les invitant à monter à bord. Perplexes et inquiets, Rémi et Suzie ne bougèrent pas d’un centimètre. Devant l’inaction des enfants, le conducteur fit sonner la flûte de son train.

TCHOU ! TCHOU ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding ! Ding !

Elle faisait un tel vacarme que Suzie, oubliant toutes recommandations face aux inconnus que sa mère lui avait faites, sortit par la fenêtre, accompagnée de son petit frère. Son intention ? Faire taire ce vacarme avant que tout le quartier soit alerté. Ignorant la demande de Suzie, le conducteur cria à tue-tête :
-Boréal Express ! Tout le monde à bord ! destination : Pôle Nord, visite annuelle d’après Noël, chez le Père Noël.
N’en croyant pas leurs oreilles, Rémi et Suzie montèrent à bord sans aucune hésitation.

Fin de la première partie
Faire le ban du train avant de recommencer la deuxième partie



Où en sommes-nous dans notre histoire ?  Ah oui ! Un train, le Boréal Express vient d'apparaître chez Suzie et Rémi . Est-ce possible ? Et bien oui !  C'est ce qui est arrivé.

 En s'assoyant sur l'unique banquette à trois personnes du Boréal Express, sur laquelle était inscrit un numéro  167,398,725, quelque chose de bien curieux arriva. Ce chiffre, justement, changea aussitôt que leur postérieur toucha la banquette. Nous pouvions maintenant lire 167,398,727. Facile à comprendre ! Ce chiffre indique le nombre de personnes qui ont voyagé avec le Boréal Express. Rémi et Suzie se savaient  privilégiés. C'est donc sans très grande discrétion, que le Boréal Express s'envola vers le Pôle Nord ???  Non !  Vers la rue St-Alphonse.
 D'après les directives du Père  Noël, le conducteur devait aller chercher un autre passager.

 Mais de qui s'agissait-il ? . Le conducteur arrêta le Boréal Express devant le 139 de la rue St- Alphonse.  Qui est le troisième chanceux ???  Vous l'aurez deviné Philippe Beauregard.
 Le conducteur employa la même tactique.

 TCHOU ! TCHOU! Ding! Ding! Ding! Ding! Ding!

 Rien, personne ne bouge dans la maison. Il recommence.

 TCHOU ! TCHOU ! Ding! Ding! Ding! Ding! Ding!

 Suzie et Rémi s'inquiètent vraiment du bruit que fait la flûte du Boréal Express. Elle est d'une telle puissance.

 TCHOU ! TCHOU ! Ding! Ding! Ding! Ding! Ding!

 Finalement, Philippe se pointe à la fenêtre. Il était à peu près temps. Toujours aussi rapide ce cher Philippe. Le conducteur fit les mêmes gestes à Philippe. Mais celui-ci resta de marbre.
 De sa voix la plus forte, le conducteur cria :
- "  Boréal Express ! Tout le monde à bord! Destination : Pôle Nord, visite annuelle d'après  Noël chez le Père  Noël ."
 Au lieu d'être excité comme tout enfant normal, Philippe Beauregard fit l'une de ses plus belles grimaces au conducteur. Celui-ci, ne se laissant pas décourager par l'attitude de Philippe   se remit à crier de plus belle :
- "  Boréal Express ! Philippe Beauregard! C'est pour toi ce train! Viens! "
 Surpris du fait que le conducteur connaissait son nom, Philippe sortit, lui aussi par la fenêtre, pour venir voir qui lui jouait un mauvais tour.  Tout près du train, la porte s'ouvrit brusquement et son entrée fut comme si Philippe avait été aspiré à son bord. Philippe n'avait plus le choix de rester à l'intérieur  puisque la porte se verrouilla derrière lui. Pris de panique, Philippe n'avait même pas remarqué la présence de Rémi et de Suzie.

Il y eut très peu d'échange entre les passagers puisque d'un côté Rémi et Suzie ne comprenaient pas pourquoi le Père  Noël  invitait Philippe chez lui et de l'autre côté Philippe n'aimait pas se retrouver dans ce train en compagnie de Suzie. C'est donc dans une atmosphère très peu agréable que le voyage se passa. Heureusement pour tout le monde celui-ci ne prit que 53 minutes et 34 secondes très précisément.

- "   Pôle Nord, tout l'monde descend"  s'empressa de dire le conducteur du train.
- "  Mais où sommes-nous ? "   se demanda Philippe .
- "  T'as pas compris ce que le conducteur a dit . Nous sommes au Pôle Nord", ajouta Suzie.
- "  Mais ça ne se peut pas ! "  répliqua Philippe.
- "  Crois-le, crois-le pas c'est ça qui est ça "   dit Rémi sur un ton plutôt fâché.  "  Tu vois ben qu'il existe le Père Noël  espèce de ...."
- "  Voyons,voyons les enfants ! N'est-ce pas une nuit formidable ! " coupa le conducteur." Cessez de vous prendre aux cheveux et profitez bien de votre séjour au royaume du Père  Noël .
 Tiens ! Le voici justement ."

C'est avec beaucoup d'énervement et d'impatience que Suzie et Rémi voulaient revoir le Père Noël, car eux, ils l'avaient déjà vu avant aujourd'hui. Pour Philippe, c'était avec méfiance qu'il regarda cet étrange personnage approcher du Boréal Express. C'est un Père  Noël  super souriant qui accueillit nos trois jeunes visiteurs. Les présentations n'étant pas nécessaires, le Père  Noël guida Rémi, Suzie et Philippe à travers ce pays magique. Il parlait beaucoup ce cher Père Noël. Il expliqua tout en détail; l'atelier de fabrication des jouets,  l'espace réservé au courrier ( réception et envoi ), l'emplacement  pour ses rennes et la liste continue. Rémi et Suzie avaient les yeux grands ouverts . Ils écoutaient sans se lasser toutes les anecdotes que le Père  Noël voulut bien partager avec eux. Ils allaient de découverte en découverte.
C'était merveilleux, fantastique, époustouflant. Ils n'auraient jamais cru une chose pareille.
Eux, au royaume du Père Noël! C'est vraiment débile!  Bref, ils étaient vraiment heureux de se retrouver dans ce monde que nul ne peut imaginer . Il faut le voir pour y croire. C'est super!

Pour Philippe, c'était autre chose. Il  refusait d'y croire. Il ne cessait pas de dire au Père Noël, ou plutôt, à la personne qui prétendait l'être, d'arrêter de jouer la comédie. Il voulait retourner chez lui. Le Père  Noël  faisait le sourd et continuait à montrer, à expliquer, et même à les inviter d'essayer divers jeux. Philippe se plia à toutes les demandes de ce     mystérieux bonhomme à la barbe et cheveux blancs, et en passant la barbe et les cheveux sont vrais, car Philippe ne s'était pas gêné pour tirer dessus. Par contre, il ne démontra aucun  plaisir à le faire. Rémi et Suzie  étaient tout simplement ravis. Ils étaient au septième ciel. Leur excitation, leur émerveillement et leur curiosité insatiable étaient à un  niveau tel qu'ils en avaient pratiquement le souffle coupé. Ils ne voulaient rien manquer. Ils savaient que cette chance était unique. Il leur fallait tout tout voir.

Après la visite proprement dite du royaume, le Père Noël invita nos jeunes visiteurs à bien vouloir le suivre dans son humble demeure pour y partager un léger goûter; biscuits et verres de lait évidemment. Encore là, leur hôte fut merveilleux. Il est d’une gentillesse incroyable ce Père Noël.
Mais malheureusement, toute bonne chose a une fin. Il était temps de retourner à la maison. Le Boréal Express était là, qui les attendait, avec son conducteur à bord.

TCHOU ! TCHOU ! Ding! Ding! Ding! Ding! Ding!

Se remit à faire le train. Il fallait quitter cet endroit. C’était l’heure ! Quel dommage pour Rémi et Suzie ! Après quelques bizous et plusieurs caresses faites au Père Noël, Rémi et Suzie reprirent place dans le Boral Express. Philippe se contenta d’une poignée de main. Un minimum de savoir-vivre s’imposait quand même, car, il devait bien l’avouer, ce vieux fou savait recevoir.

TCHOU ! TCHOU ! Ding! Ding! Ding! Ding! Ding!

Criait le train. Il fallait vraiment partir ! Le conducteur s’impatientait. Le temps passait et il devait être à l’heure. Le Boréal Express respecte toujours ses horaires. Le Père Noël avait encore une chose pour ses visiteurs : un petit souvenir. Pour Rémi, c’était une reproduction miniature du Boréal Express. Pour Suzie, c’était le royaume du Père Noël emprisonné dans une boule de verre. Vous savez, ces fameuses boules que l’on retourne et on dirait qu’il neige à l’intérieur. Pour Philippe, c’était une cloche, une petite cloche. Quelques larmes furent versées par Suzie, Rémi et le Père Noël. Philippe, lui, regardait dans la direction opposée afin de ne pas montrer ses émotions. Quelles étaient ses émotions à ce moment précis ? Personne ne le sait, et ne le saura jamais.

C’est dans le même vacarme infernal que le Boréal Express ramena nos trois explorateurs du Pôle Nord à bon port. Rémi et Suzie quittèrent le train en premier, prenant soin de remercier le conducteur. Légèrement fatigués, mais très heureux, ils regagnèrent leur maison et leur lit pour s’endormir aussitôt avec le cadeau reçu du Père Noël dans leurs mains. Pour sa part Philippe quitta le train en laissant volontairement derrière lui, sur la banquette, la petite cloche que le Père Noël lui avait donnée.

« Je ne sais pas comment ce bonhomme a réussi à monter son coup, mais je vais trouver une réponse. »
Le lendemain matin, Philippe se leva et trouva une petite boîte bien emballée sur la table de la cuisine. Elle lui était adressée. Il s’empressa de l’ouvrir. Quelle ne fut pas sa surprise de voir la petite cloche qu’il avait laissée sur la banquette dans le train. Une note était jointe.

"Cher Philippe,
Tu as oublié ta cloche dans le train. Je tenais vraiment que tu en sois son propriétaire, car si tu entends son tintement, tu ne peux nier mon existence.
Père Noël "

Comment une cloche peut-elle sonner sans grelot? Il est fou! Sans hésiter, Philippe secoua la cloche.
(faire tinter discrètement une clochette et la cacher immédiatement dès la fin de l'histoire... Si les jeunes en parlent, les adultes diront qu'ils n'ont rien entendu...)
À sa grande surprise, le tintement était doux, mais perceptible. Les jeux sont faits et rien ne va plus pour Philippe, ou plutôt… tout a changé pour lui. Et pour vous?

Colette Roy

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